- Un géant territorial
Entre 38ème et 8ème parallèles, l'Inde s'étend sur 3 200 kms des sommets de l'Himalaya au Nord à sa pointe tropicale face au Sri Lanka au Sud, et d'Ouest en Est sur 3 000 km du Pakistan à la Birmanie. C'est un territoire plus de six fois supérieur à celui de la France et similaire à celui de l'Union européenne élargie. La mousson lui donne une certaine homogénéité climatique, par son rythme binaire contraignant. L'Inde est à elle seule un sous-continent, massif et géographiquement autonome au flanc sud de l'Asie, dessiné comme un triangle dont la base serait la barrière himalayenne, et les deux côtés, la façade maritime de 6 000 km de rivages de l'Océan indien.
- On distingue quatre types de régions en Inde.
Au nord, les chaînes montagneuses de lHimalaya sont séparées par les vallées du Kulu et du Cachemire.
La plaine septentrionale ou bassin du Gange est la région la plus peuplée dInde. Arrosée par le Gange, lIndus et le Brahmapoutre, cette plaine est la région la plus fertile de lInde.
Les régions désertiques regroupent le désert du Thar dans le Rajasthan et le Rann de Kutch, zone marécageuse dans le Gujarat.
Le plateau du Deccan est bordé par des cordillères escarpées (ghats), à lEst comme à lOuest.
- Un géant démographique
Actuellement près de 1,1 milliard d'habitants (Population estimée à 1 065,5 millions d'habitants en 2003 (source ONU, 2003) qui deviendrait 1 230 millions en 2015, 1351,8 millions en 2025, 1 531,4 millions en 2050. ), le deuxième Etat le plus peuplé de la planète, juste derrière la Chine et ses 1,3 milliard d'habitants ; la population a triplé depuis les années 1950 et affiche encore cette décennie un taux de croissance de l'ordre de 2 % par an (1,7 % en 1999-2000). Autrement dit, chaque année, l'Inde doit compter avec 20 millions d'individus en plus ( soit à peu près la population de l'Australie), à devoir loger, scolariser, éduquer, nourrir et employer.
Il est prévu que dans dix ans lInde dépassera la Chine dont la démographie est mieux maîtrisée ; l'Inde ne pratique pas de mesures de contrôle des naissances ; les traditions métaphysiques et religieuses dominantes et les difficultés d'éducation et de prévention en direction notamment des femmes ne les favorisent pas.
Dans ces conditions, l'Inde est freinée et handicapée dans son développement et son niveau de vie. Elle est encore loin d'avoir achevé sa transition démographique (c'est-à-dire à la fois une réduction du taux de natalité et une baisse du taux de mortalité - qui étaient pour l'Inde en 2000, respectivement de 27,2 et 8,9 pour mille). C'est probablement l'une des explications à la qualification trop fréquente, et courante, de "pays du Tiers-monde" lorsqu'il est question de l'Inde alors que cette assimilation n'est pas exacte.
- La répartition géographique de la population est hétérogène
La population urbaine indienne est la plus importante du monde : près de 300 millions de citadins en 2003. Malgré cela, 72,7 % de la population vit à la campagne. On recense vingt-cinq villes dépassant le million d'habitants, dont les quatre plus grandes sont Mumbai (Bombay), Calcutta, Delhi et Chennai (Madras), en agglomérations respectives de 18,1 ; 12,9 ; 11,7 et 7 millions d'habitants (estimation de 2001) ; les villes se trouvent confrontées à des problèmes de surpeuplement, d'urbanisme, d'insalubrité, de bidonvilles et de "sans domicile".
Autre défi pour l'Etat : faire face à une grande inégalité de répartition de la population sur le territoire. Certaines régions défavorisées tels les déserts du Rajasthan ou les forêts du Madhya Pradesh, ont une densité ne dépassant pas 100 habitants/km2, alors que la densité moyenne du pays était de 289 habitants/km2 en 2000. Par contraste, la saturation est tout à fait perceptible dans certains Etats du Nord, comme le Bengale occidental ou le long du littoral du Kerala, avec des taux moyens généralement supérieurs à 750 habitants/km2.
Dans la plupart des villes indiennes, la densité moyenne de population est proche de 3 000 habitants/km2. La tendance ne fait que s'accélérer depuis les trente dernières années. À l'évidence, l'exode rural contribue fortement au dynamisme démographique des villes indiennes. Les bidonvilles abriteraient, en moyenne, plus d'un quart de la population urbaine, proportion d'autant plus importante que la ville est grande (plus des deux cinquièmes des habitants pour une ville de plus d'un million d'habitants, selon une étude menée dans vingt-trois villes)
Cette croissance démographique pose de sérieux problèmes, à la fois pour l'éducation, le logement, l'hygiène, mais surtout pour l'accès à l'emploi. En outre, elle a mis en échec tout effort de planification urbaine, en raison aussi de l'insuffisance des ressources financières des municipalités ( 5 % de celles de l'Etat fédéral) en charge des équipements locaux.
- Une identité politico-culturelle originale
- Une mosaïque didentités culturelles influençant les comportements économiques.
- Les langues indiennes et l'anglais
Voulue par la constitution de 1950, l'Union indienne est aussi une fédération linguistique hors normes. Plus de 1 600 langues, parmi lesquelles 418 sont officiellement répertoriées et dont 34 sont parlées chacune par plus d'un million de locuteurs, rassemblant ainsi 84,5 % de la population (soit 765 millions de personnes)!
Comment gérer une telle diversité ? Les principes d'une langue par Etat fédéré (ou Territoire) et de stricte hiérarchie des langues ont été tant bien que mal instaurés. L'hindi, de la famille linguistique indo-européenne, est sans aucun doute la langue la plus importante. Plus de la moitié de la population l'utilise en tant que langue maternelle ou seconde, et elle concerne 72 % de la population. C'est pourquoi la Constitution du 26 janvier 1950 lui confère un statut privilégié de langue nationale officielle, donné aussi à l'anglais qui, après l'indépendance devait après une période transitoire de 15 ans permettre au jeune Etat fédéral de promouvoir l'hindi dans tout le pays et de forger la prééminence de cette langue. L'hindi est certes en expansion, c'est aussi un vecteur de l'hindouisme culturel et religieux ; mais demeurent présentes les autres langues locales ou propres aux minorités religieuses (musulmane par exemple) ou communautaires spécifiques, et l'anglais garde une place importante.
- L'alphabétisation des populations
Avec l'harmonisation linguistique de la population, un autre enjeu crucial pour l'avenir du développement et la maîtrise de la démographie est l'alphabétisation des jeunes, et notamment des populations rurales. En Inde, la proportion danalphabètes est parmi les plus élevées du monde ; on estime que 40 % de la population est touchée par le fléau, ce qui correspond à la proportion de la population touchée par la pauvreté. Les femmes en sont les premières victimes: en 2000 près des 2/3 des femmes sont analphabètes contre 1/3 des hommes.
Lévolution depuis l'indépendance en 1947 va pourtant dans le bon sens: de plus de 80 % de la population d'analphabètes en 1947, le chiffre tombe à 70 % au cours des années 1960; en 1991, plus de 60 % des femmes étaient exclues de l'enseignement primaire alors que 36,1 % des hommes se faisaient recenser comme analphabètes.
L'extrême disparité culturelle et linguistique qui singularise la société indienne rend très lents les effets de la politique de scolarisation des jeunes par les pouvoirs publics, qui se heurte d'ailleurs à une proportion notable, dans des secteurs défavorisés, de jeunes enfants qui travaillent, et d'exclusions sociales frappant les "basses classes". Cette faiblesse qui caractérise le système éducatif du niveau du primaire et aussi du secondaire est d'autant plus frappante que l'Inde dispose d'un enseignement supérieur de haut niveau
- Un Etat laïque où co-existent, parfois difficilement, différentes
religions
Berceau de l'hindouisme, du bouddhisme et du jaïnisme, l'Inde accueille aussi bien d'autres religions du monde.
Lhindouisme est de loin la principale religion puisqu'elle est pratiquée par 82 % de la population (soit 700 millions de personnes). L'hindouisme déborde le territoire de l'Inde pour constituer des minorités importantes au Pakistan, au Bengladesh, au Sri Lanka (tamouls).
Les musulmans représentent la plus importante minorité religieuse, soit 12,1 % de la population (près de 122 millions de personnes); leur répartition sur le territoire est très inégale; situés pour l'essentiel au nord du pays, ils constituent les 2/3 de la population du Cachemire et environ 1/4 de celle des Etats de l'Assam, du Bengale occidental et du Kerala.
Les chrétiens représentent à peine près de 2 % de la population ce qui fait néanmoins 20 millions ; pour autant, ils forment la troisième communauté religieuse, avant les sikhs, les jaïns et les bouddhistes ; plus de 90 % des chrétiens indiens sont de confession catholique. Les Protestants sont très peu nombreux: à peine plus de 2 % de la communauté chrétienne.
Quant au bouddhisme, il ne représente que 0,7 % de la population, bien que l'Inde ait été son berceau.
Le jaïnisme, dont la branche du"siècle" est influente dans l'ouest et le sud par nombre de ses adeptes qui jouent un grand rôle économique comme hommes d'affaires, commerçants, concerne 0,4 % de la population, soit 3,5 millions.
Les sikhs se distinguent des hindouistes notamment par une forte tradition militaire, surtout dans le Pendjab, et représentent 1,9 % de la population soit 16,3 millions.
Cette grande diversité de communautés et de religions qui pourrait être perçue comme un atout et une source d'enrichissement mutuel, est souvent celle de nombreux conflits, de rivalités politiques et sociales. Force est de constater que le fait religieux est de plus en plus présent dans le débat public indien et s'exprime par des tensions et violences de divers types, notamment entre hindouistes et musulmans: difficultés périodiques de cohabitation ou de juxtaposition entre communautés dans certaines agglomérations, aboutissant parfois à des services publics ou collectifs séparés; bouffées défensives ou offensives pour des revendications ou des symboles religieux ; destruction de la mosquée Babri Majid en Uttar Pradesh (décembre 1992); émeutes interconfessionnelles de 2002 au Gujarat ; double attentat de Mumbaï (Bombay) en août 2003. Mais aussi, très ponctuelles et exceptionnelles, des exactions contre des Chrétiens suspectés de prosélytisme, cible à la fois de musulmans et d'hindouistes.
D'un autre type de conflit relèvent les affrontements entre Inde et Pakistan sur la question non résolue, et pas seulement religieuse, du Cachemire revendiqué par les deux pays.
Également, c'est un événement tragique de nature différente qui a concerné la minorité sikh à Amritsar en 1984.
Toutefois, dans cet immense pays, ces violences n'engagent que très marginalement la population indienne ; elles sont ciblées, brèves, localisées et la grande majorité des États en sont indemnes, ceux notamment en plus fort développement économique ou culturo éducatif.
Si certains partis politiques sont enclins au militantisme hindouiste, la règle et sa pratique constitutionnelles sont celles d'un État libéral, multiethnique et multiconfessionnel officiellement neutre vis-à-vis des croyances et respectueux de la liberté de conscience.
- Le système des castes hindouistes et les exclusions
La division de la société hindouiste en différentes castes, longtemps décriée comme une structure d'enfermement peu propice au jeu démocratique et aux échanges économiques, semble évoluer dans le sens d'une prise en compte de plus en plus importante des castes les plus basses et des catégories défavorisées dans le jeu politique, et, de ce fait, dans les rapports économiques. Bien que la constitution indienne de 1950 ait aboli l'intouchabilité, en prohibant "toute discrimination fondée sur la religion, la race, la caste, le sexe et le lieu de naissance" (article 15), cette affirmation constitutionnelle n'a toutefois pas empêché les discriminations de perdurer dans un véritable apartheid. L'Etat s'est toutefois engagé à favoriser lintégration des classes défavorisées à travers des mécanismes qui permettent notamment dans le secteur public de réserver un certain nombre d'emplois aux catégories des basses castes et des intouchables, ainsi que des sièges parlementaires, des bourses ou des places dans les universités. Mais la rétraction du secteur public due aux privatisations engagées depuis 1994 contrarie les effets de cette action.
- Un Etat jeune et une démocratie enracinée
- Institutions démocratiques
L'Inde se revendique la "plus grande démocratie du monde"; elle organise des consultations électorales au suffrage universel direct ou indirect peu contestées en régularité, ouverture et loyauté, avec reconnaissance d'un multipartisme libre et ouvert.
Certes, ces consultations doivent surmonter certains handicaps : clientélisme, dérives populistes ou nationalistes, corruption, pressions du groupe social, analphabétisme.
Le système constitutionnel de l'Inde s'inspire du britannique. Un Président de la République, exerçant une magistrature morale, de représentation, et de préservation des valeurs nationales, est élu pour cinq ans par un collège de grands électeurs. Un Premier ministre, nommé par le chef de l'Etat, investi par le Parlement et responsable devant lui, exerce, par son gouvernement, l'essentiel du pouvoir exécutif.
Le parlement de l'Inde est bicaméral : une Chambre Basse (Lok Sabha) rassemble 543 députés élus au suffrage universel direct pour une durée de cinq ans par un scrutin uninominal à un tour. Une Chambre Haute (Rajya Sabha), dont les 250 membres sont élus au suffrage indirect pour cinq ans, ne pouvant renverser le gouvernement, représente les 28 Ètats fédérés et les 7 Territoires de l'Union.
Les États fédérés sont dirigés par un gouvernement présidé par un premier ministre (Chief Minister), responsable devant une assemblée législative qui est formée de députés élus pour cinq ans au suffrage universel direct et qui vote les lois dans les limites de ses compétences constitutionnelles.
La constitution indienne partage les compétences entre lÉtat fédéral et les États fédérés sur la base de trois listes: la liste de lUnion, la liste des Etats et la liste des sujets partagés. Les États fédérés assument un rôle croissant en matière économique, et certains développent des politiques fiscales attractives pour les investisseurs étrangers.
Le système judiciaire est indépendant dans ses organes de jugement, et calqué sur le modèle britannique.
Les institutions et leur pratique sont ainsi réellement démocratiques ; d'ailleurs, certains observateurs voient les majorités politiques au pouvoir s'orienter vers l'acceptation naturelle de l'alternance, plutôt rare dans les pays en développement: le Parti du Congrès a été au pouvoir jusqu'en 1996; ce fut ensuite le tour de la coalition autour du Parti du peuple indien (BJP) jusqu'en 2004 qui marqua le retour du Parti du Congrès; les Ètats ont des majorités politiques diverses et souvent différentes des majorités fédérales.
Malgré plusieurs assassinats de dirigeants politique, de Gandhi (1948) au petit-fils de Nehru, Rajiv Gandhi (1991), l'Inde n'a pas connu une vie politique aussi tumultueuse que celle du Pakistan. Les coups d'Etat militaires lui sont étrangers. L'emploi de la force armée sur le territoire de l'Union s'est raréfié aprés que les rajahs du Hyderabad et de Mysore ou les colonisateurs de Pondichery et de Goa ont été évincés. Seul le Cachemire-Jammu, théatre du conflit avec le Pakistan en fait encore usage, hormis les assez rares circonstances où l'armée a dû se porter en renfort de la police pour maîtriser quelques émeutes ou guerillas locales. Au reste, les catastrophes naturelles ont occupé l'appareil militaire plus que ne l'ont fait les tumultes publics. Qui plus est, cet appareil pèse nettement moins lourd, dans les budgets de l'Union et des Etats fédérés que dans ceux de leurs homologues pakistanais.
- Un Etat de droit
En Inde le droit est fortement inspiré du système juridictionnel
anglo-saxon, dit de "Common Law". Ce droit, de nature coutumière et jurisprudentielle, garantit une véritable indépendance de la justice et le respect des droits et des obligations du préjudiciable. Les lois sont rédigées en anglais et interprétées librement par des magistrats indépendants ; cela donne lieu à des jurisprudences évolutives suivant le principe du "Common Law".
- Fédéralisme, décentralisation et unité nationale
L'organisation territoriale est construite sur un schéma fédéral. L'Union indienne est un Etat relativement récent, à peine plus ancien que la République Populaire de Chine. L'indépendance, proclamée le 15 août 1947 par Lord Mountbatten, dernier vice-roi des Indes, n'a pas été sans difficulté territoriale (séparation du Pakistan, Sri Lanka, Bengladesh), mais la stabilité du pays est attestée par des institutions qui ne se sont guère modifiées depuis cinquante ans.
L'Inde est membre du Commonwealth. Elle est une Fédération composée maintenant de 28 Etats auxquels il faut ajouter 7 Territoires. Entre les Etats fédérés les disparités économiques et sociales peuvent être très grandes. LEtat central fédéral est source d'impulsion, d'homogénéisation et d'unité nationale sauf pour certaines des minorités religieuses, surtout musulmanes, qui peuvent apparaître comme se crispant dans des attitudes communautaristes aux pulsions parfois violentes.
Larmée indienne est un creuset d'échanges intercommunautaires et un facteur fort d'unité nationale. Elle compte 1 200 000 hommes, ce qui en fait la quatrième dans le monde après la Chine, la Russie et les USA. Son équipement nucléaire ajoute à son poids quantitatif; la communauté Sikh, par la force de sa tradition et de sa valeur militaire, y représente encore 14 % des effectifs après 25 % en 1950.
- de l'indépendance à son arrivée sur la scène mondiale
Le problème religieux entre les Hindous et les Musulmans
Depuis 1927, le Congrès indien réclamait l'indépendance. La fin de la Seconde Guerre mondiale amena les Britanniques à réaliser que l'indépendance était inévitable: ils n'avait plus le pouvoir ou la volonté de maintenir un si vaste empire, le "joyau de la Couronne britannique". Le parti du Congrès de Jawaharlal Nehru veut une Inde unie, laïque et centralisée alors que la Ligue musulmane de Muhammad Ali Jinnah souhaite au minimum une forte décentralisation et une large autonomie pour les régions à majorité musulmane et donne sa préférence à la création d'un Etat séparé. La partition de l'Inde sera finalement précipitée par l'appel d'Ali Jinnah (juillet-août 1946) à des manifestations pour obtenir la création d'un Etat séparé. Devant l'ampleur des affrontements communautaires, le Royaume-Uni nomme lord Louis Mountbatten pour essayer calmer les esprits et préparer l'indépendance: la division politique s'avéra une tâche difficile en raison du mélange des populations à travers tout le pays et du fait que les deux grandes régions musulmanes restaient séparés par 1600 kilomètres dans deux côtés opposés de l'Inde, le Pakistan occidental (Pakistan actuel) et le Pakistan oriental (Bangladesh actuel). Les Britanniques précipitent leur départ et donnent l'indépendance à l'Inde et au Pakistan en août 1947 au lieu de juin 1948. La partition du pays provoque le déplacement de plus de 10 millions de personnes (6 millions de musulmans et 4 millions d'hindous) essentiellement dans les Etats du Sind et du Penjab qui sont divisés en deux. Ces migrations et les affrontements liés à la partition entraîneront un très grand nombre de victimes (environ 200 000).
L'Inde indépendante
Le 15 août 1947, l'Inde obtint son indépendance et Nehru (décès en mai 1964) devint premier ministre de l'Inde Hindoue. À la suite de la division de l'Empire des Indes entre l'Inde et le Pakistan, de nombreux problèmes surgirent, dont des massacres et des affrontements qui ne sont guère résolus à l'heure actuelle, notamment celui du Cachemire. Le conflit territorial du Cachemire va structurer les relations des deux pays et être le fondement d'une opposition continue, de deux guerres et d'affrontements armés importants à partir de 1949.
Le 30 Janvier 1948, Gandhi était assassiné par un extrémiste hindou. La disparition de linspirateur de lindépendance ouvrit une nouvelle période de lhistoire indienne, caractérisée par une relative stabilité. Puis Nehru engagea le pays dans la voie de l'industrialisation et, au plan international, de la neutralité. LInde fut ainsi à lorigine du mouvement dit des "non-alignés", qui refusaient de choisir entre le camp américain et le camp soviétique. Le 26 janvier 1950, l'Inde adopta une nouvelle constitution qui en fit un État fédéral, l'Union indienne, une république démocratique laïque, membre du Commonwealth britannique. Entre 1952 et 1956, l'État indien annexa Pondichéry et quatre autres comptoirs français de l'Inde (Pondichéry, Yanam, Karaikal et mahé), en réalité déjà autonomes depuis 1939. Le traité officiel de sa cession fut signé le 8 mai 1956 entre l'Union indienne et la République française. Pondichéry fit alors partie intégrante de l'État de Madras, aujourd'hui l'État du Tamil Nadu.
Lors de la révolte tibétaine de mars 1959, quelque 9000 réfugiés tibétains demandèrent lasile politique à lInde. Ils sinstallèrent à Dharamsala dans lÉtat de Himachal Pradesh, où le dalaï lama a aujourdhui encore sa résidence.
En 1961, après un bref conflit, l'Inde envahit et annexa les territoires de Goa et de Daman-et-Diu, qui appartenaient au Portugal.
En 1962, le gouvernement chinois de Mao Zedong, qui contestait la souveraineté indienne dans l'est du Cachemire, lance une offensive victorieuse pour s'emparer de la région.
En 1963, sous l'initiative de Nehru, le Parlement fédéral indien adoptait la loi n° 19, appelée Loi sur les langues officielles (Languages Official Act). Cette loi, qui sera modifiée en 1967, fixait les conditions d'utilisation tant de l'hindi que de l'anglais dans la conduite des affaires relevant de la juridiction du gouvernement fédéral, ainsi que dans les cours de justice.
L'après-Nerhu
En 1965, toujours au Cachemire, croyant l'Inde diminuée après sa défaite contre la Chine en 1962, le Pakistan passa encore à l'attaque. Mais la supériorité militaire de New Delhi fut sans appel, un rapport de forces que confirmera plus tard la guerre de 1971.
En 1966, la dirigeante du Parti du Congrès, Indira Gandhi (1917-1084), la fille de Nehru, devint premier ministre; elle opta pour des réformes socialistes qui mécontentèrent les notables, ce qui fragilisa son pouvoir au Congrès.
En 1971, une guerre civile éclata dans la partie orientale du Pakistan, aujourdhui le Bangladesh. Les Bengalis affluèrent alors massivement en Inde, et les relations entre lInde et le Pakistan occidental (Pakistan actuel) se détériorèrent. En décembre, lInde entra en guerre aux côtés du Pakistan oriental (Bangladesh), ce qui obligea larmée pakistanaise à se rendre. De nombreux réfugiés bengalis regagnèrent alors leur pays. Les accords de Simla en 1972 consacrèrent la défaite complète du Pakistan.
En 1975, le petit royaume du Sikkim (situé entre le Népal et le Bhoutan) fut annexé par l'Inde.
En 1976, la Loi sur les langues officielles de 1963 fut complétée par les Règlements sur les langues officielles (The Official Languages Rules), lesquels seront modifiés en 1987.
En 1977, Indira Gandhi organisa des élections générales, espérant le soutien du peuple, mais elle perdit son siège au Parlement, tandis que le Parti du Congrès, pour la première fois depuis 1952, nobtint pas la majorité.
- Parti historique de l'Inde et du combat pour l'indépendance, le parti du Congrès a joué un rôle essentiel dans la politique indienne pendant plusieurs décennies. Il était au pouvoir aussi bien à Delhi que dans les Etats fédérés sauf dans quelques Etats traditionnellement communistes comme le Kerala ou le Tamil Nadu. Cette domination est le fait, dans une large mesure, de l'influence des deux grands leaders du parti issu de la famille Nehru : Jawaharal Nehru (1889-1964) au pouvoir de 1947 à sa mort et sa fille Indira Gandhi, au pouvoir de 1966 à 1977 et de 1980 à 1984. Durant cette période, et surtout de 1947 à 1977, le Congrès a dominé sans partage la vie politique indienne réduisant l'aspect fédéraliste de la Constitution puisqu'il contrôlait tout l'appareil de l'Etat fédéral et que les Etats fédérés suivaient les directives politiques, économiques et sociales voulues par le Centre.
Le système congressiste se caractérisait par sa capacité à capter, grâce au soutien des notables, les "banques de votes" c'est à dire le vote de régions ou de castes entières. Il s'est également appuyé sur les paysans, enrichis grâce aux réformes agraires menées par Nehru, les "Maliks", sur les grandes familles industrielles et commerçantes comme les Tata et les Birla en raison du soutien du Congrès au développement autocentré à l'industrie et au capitalisme indien. Enfin, le Congrès s'est appuyé sur l'élite intellectuelle urbaine, dont une part importante avait été anglicisée et dont Nehru était, d'une certaine manière, le représentant.
Le parti du Congrès accentuait enfin son emprise en rassemblant les Indiens dans le projet de politique étrangère bâti par Nehru faisant de l'Inde l'un des animateurs respectés du mouvement des non-alignés. Cependant, l'usure du pouvoir, son exercice particulièrement autoritaire par Indira Gandhi durant la période d'application de l'état d'urgence de 1975 à 1977 ont conduit à son affaiblissement et à l'alternance.`
- Une stratégie historique de non alignement
De 1947 à 1977, les gouvernements indiens ont inscrit la politique extérieure de leur pays dans le prolongement d'une politique économique relativement autarcique, visant la conquête d'une plus grande indépendance.
L'Inde fut l'un des pays fondateurs et un acteur majeur du mouvement des non-alignés, dont les objectifs affichés furent la recherche de la paix entre les nations, l'égalité et la liberté de tous les peuples, la solidarité entre les peuples colonisés d'Asie et d'Afrique, le soutien aux mouvements d'indépendance et le non-engagement dans les conflits Est-Ouest.
Le non-alignement constituait une conséquence logique de l'indépendance nationale, chaque nation poursuivant sa propre politique de non-alignement. En conséquence, l'appartenance à ce mouvement ne signifiait pas l'adoption d'une position de neutralité politique, mais impliquait l'absence de participation aux systèmes d'alliances militaires dirigés par les Etats-Unis et l'URSS pendant la Guerre froide.
Le modèle "socialisant" de développement indien, critiqué par de nombreux pays occidentaux, a contribué à rapprocher l'Inde de l'URSS avec qui elle a conclu des accords de coopération à compter de 1962, notamment en matière d'équipements militaires.
L'hétérogénéité des nations participant au mouvement des pays non-alignés, de leurs amitiés et de leurs intérêts nationaux a nui à son efficacité et à son rôle sur la scène internationale. L'accélération de la décolonisation au cours des années soixante a diminué la cohésion de ce mouvement en lui ôtant sa raison d'être initiale. Le développement des conflits et des tensions entre les grandes puissances dans une logique de rapport de force, notamment en Asie, a contribué également à la diminution de la pertinence du concept de non-alignement.
Le déclin de la rhétorique du non-alignement est aujourd'hui évident. Les négociations dans le cadre de l'Organisation des Nations-Unies ou de l'Organisation Mondiale du Commerce s'effectuent en ordre dispersé, le mouvement des non-alignés peinant à constituer un groupe de pression efficace au sein des institutions internationales.
Désormais, l'Inde semble accepter comme un état de fait la suprématie américaine, mais cherche à éviter les dangers de cette domination. Ainsi, la diversification de ses relations en direction de l'Europe, de l'Asie ou des républiques issues de l'Union soviétique vise à équilibrer l'influence américaine.
Même si la stratégie de non-alignement prônée par l'Inde a perdu de sa pertinence avec la fin de la "Guerre froide", elle se prolonge dans la volonté indienne d'équilibrer la domination américaine en faisant valoir ses positions sur la scène internationale. La politique extérieure de l'Inde semble désormais axée sur la recherche de la reconnaissance de son statut de grande puissance régionale en Asie.
- En 1979, le gouvernement mené par le Parti Janata (ou Parti du peuple) perd la majorité au Parlement. Les élections organisées en janvier 1980 consacrent la victoire du Parti du Congrès et dIndira Gandhi, de nouveau premier ministre de l'Union.
Le 31 octobre 1884, Indira Gandhi est assassinée par deux sikhs de sa garde personnelle. Au cours des émeutes qui suivent cet assassinat, un millier de sikhs sont tués par la foule.
Le fils d'Indira Gandhi, Rajiv Gandhi (1944-1991), est nommé premier ministre quelques heures après le décès de sa mère. Confirmé à ce poste lors des élections législatives de décembre 1984, Rajiv Gandhi répond aux exigences des Sikhs en acceptant dagrandir les frontières du Pendjab. Le 3 décembre 1984, une fuite de gaz toxique provenant dune usine de pesticides de la compagnie Union Carbide, implantée à Bhopal dans le centre de lInde, provoque la mort d'environ 3300 personnes, entraînant de nombreuses maladies dont souffrent encore dizaines de milliers d'Indiens Indiens.
Aux élections de novembre 1989, le Parti du Congrès perd sa majorité au Parlement au profit du Parti socialiste du peuple qui du fait de dissensions internes amene à de nouvelles élections; Rajiv Gandhi, à son tour, est assassiné en pleine campagne électorale par un extrémiste tamoul. Les électeurs, choqués, donnent au Parti du Congrès la majorité au Parlement, et Narasimha Rao, ancien ministre des Affaires étrangères et partisan de Gandhi, devient premier ministre et le premier dirigeant indien à changer de politique économique, en renonçant notamment au dogme du protectionnisme. Son gouvernement met en uvre plusieurs réformes libérales, engage un vaste programme de privatisations, mais les rivalités religieuses ruinent à nouveau ce processus douverture.
En janvier 1993, des émeutes éclatent (faisant environ 3000 victimes) après la destruction, par des extrémistes hindous, de la mosquée Babri Masjid d'Ayodhya, dans lÉtat de l'Uttar Pradesh.
En janvier 1994, lInde et le Pakistan entament des pourparlers sur lavenir de cette région, sans véritable issue. Du fait que le Pakistan développe un programme darmement nucléaire (comme l'Inde), certains pays redoutent que le différend sur le Cachemire ne dégénère.
Les élections législatives de février et mars 1998, marquées par de nombreuses violences, confirment la montée des nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party (BJP, ou Parti du peuple indien) qui, avec lappui de leurs alliés du Tamil Nadu, disposent de la majorité absolue au Parlement.
En mai 1998 et avril 1999, lInde procède à des essais nucléaires, ce qui entraîne la réprobation internationale des membres du Conseil de sécurité de lONU, des sanctions économiques de la part des États-Unis et du Japon, une dégradation des relations avec la Chine, une aggravation de la situation au Cachemire et la réplique du Pakistan qui effectue à son tour des essais nucléaires et des tirs de missiles.
En mai 1999, de nouveaux accrochages ont lieu au Cachemire entre Indiens et Pakistanais.
En 2001, l'Inde atteint officiellement un milliard d'habitants en 2000. L'année suivante, trois nouveaux États sont créés: l'Uttaranchal, le Chattisgarh et le Jharkhand. .
Le 10 Mai 2004, à la suite des élections législatives les grands perdants de ses élections et à leur grande surprise sont les nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party (BJP) qui étaient au pouvoir depuis 1996. La croissance économique récente que connaît le pays et le rapprochement avec le Pakistan voisin jouaient pourtant en faveur du BJP. Mais malgrè la croissance économique, 250 millions dIndiens vivent encore sous le seuil de pauvreté.